Fin d’année au CP… Vingt-trois paires d’yeux grands ouverts… Vingt-trois petites têtes dont il faudra se souvenir des prénoms… Quatre séances de 2 heures réparties sur 3 semaines… On repère tout de suite bien sûr les plus audacieux, une poignée, et il y a tous les autres, les timides, les tête-en-l’air, les bavards, les « pas concernés »…
Nous en avons bougé des tables, rapproché des chaises, pour nous retrouver « entre nous », tentant de repousser les murs de la classe pour faire de cet atelier un espace
de jeu autour des mots. Tout n’était pas acquis en raison de la taille du groupe,
des temps de récréation à respecter, de la difficulté de certaines propositions…
Pourtant, à la fin de l’atelier, tous avaient parlé, écrit et dessiné, tous étaient fiers d’eux, et vingt-trois mains se levaient pour me demander de photographier les dessins réalisés. Extraits.
Les ciseaux bleus découpent le ciel.
Le coquelicot rouge monte dans le train pour aller à la mer.
Le creux noir de l’arbre mange le nombre rouge jusqu’à quatre-vingt-dix.
Une abeille jaune a peur du noir et pique la nuit.
Le sapin lit un livre rouge avec un flamant rose aux plumes bleues.
A partir des Voyelles de Rimbaud, nous avons tenté de mettre une couleur sur les mots, puis nous avons envisagé de modifier notre regard sur les arbres, en nous inspirant de Dubuffet :
Nous avons aussi rêvé d’un pays imaginaire et d’une carte postale que nous adresserions à un ami…
Je suis partie* à Bonhomme où toutes les maisons sont rondes. J’habite dans une maison ronde où le poêle ne veut pas s’allumer. Il y a des arbres carrés, les sapins sont tombés, le froid, le vent, les a blessés. Les arbres carrés sont rouges. Un jour, une tempête n’a laissé debout qu’un seul arbre, c’était un arbre géant. Sa cime allait presque jusqu’à l’espace.
Dans ce pays de Bonhomme, des éléphants bleus vivent dans les arbres. Ils sautent de branche en branche. Les garçons ont des têtes plates et les filles ont des têtes carrées. D’une manière générale, tous les habitants ont les pieds ronds et les mains rondes. Les animaux ont des corps de chat et des têtes de poisson. Peut-être que ce sont de vrais poissons-chats ? Des lions à la tête triangulaire chassent les chats-poissons ou les poissons-chats jusque dans les poubelles grises, à côté des maisons. Les chiens à la tête rectangulaire ont des lunettes au bout de la queue. Au printemps, le pays de Bonhomme sent bon la noix de coco, la cerise, la rose et le coquelicot, la fraise, la framboise, la mûre, le miel, la banane, la myrtille. En revanche, dès que l’automne arrive, ça sent franchement mauvais : le crottin, la crotte de chien, et pire encore, le fromage-qui-pue.
*C’est une petite fille qui a démarré l’histoire, puis une phrase après l’autre, les enfants l’ont poursuivie.

Puis les enfants ont écrit encore quelques phrases à partir de papiers tirés (extraits) :
Au cœur de l’univers, l’arbre papillon lointain écarte un nuage rouge cerise.
Rien n’est plus étonnant qu’un lilas jaune canari juste après l’arc-en-ciel.
Il y avait au pied de l’arc-en-ciel un palmier beige clair comme une page coloriée.
Rien n’est plus stupéfiant qu’un bambou rouge grenat dans le froissement des feuilles.
Il y avait au coin d’une rue un cerisier gris perle comme un ami désolé.
Rien n’est plus majestueux qu’un cocotier bleu turquoise au commencement du monde.
Au-dessus d’un nuage, un chêne souple ondulait comme un chameau orange.
Rien n’est plus éblouissant qu’un bambou rouge sang quand chantent les cigales.
Merci à Aurélien, Aymie, Bilel, Dimitri, Elisa, Esteban, Eva, Giulio, Hania, Jonathan, Justine, Manon, Mathias, Mélusine, Melvyn, Noélie, Numa, Sami, Tony, Tristan, Yanis, Yassine, Zian, élèves de CP de la classe de Cécile Chapel, à Florac.
super ce travail !!