Sous ce porche, je ne suis qu’un homme comme un autre. Faillible. Tu ne me réduiras pas à cela, je le sais. A cette erreur de trajectoire, à cette attirance, cette passion. C’est de la peau qui parle, cette passion, qui suinte de toutes nos frustrations, nos désillusions, nos fantasmes. Tu vois, je t’associe à moi. Regarde-moi. N’essaie pas de te souvenir. Regarde-moi, seulement. Je ne cherche pas à me justifier. J’ai compris il y a longtemps que nous étions habités par la mort. Je croyais lutter contre elle, j’ai lutté avec elle pour dépasser l’angoisse de vivre. Par optimisme, même si ça te fait rire. Et des années plus tard, la vie recommençait avec cette passion. Soulevé. Aspiré hors de soi. Tu connais ça, toi. Je me fabrique des images, des souvenirs. Pas des remords. J’éprouvais le besoin de. Comme si la conséquence que je savais inéluctable, je ne pouvais y échapper. C’est cet instant fugace où tu devines la mesquinerie de l’autre, sa méchanceté, ça te dégoûte au plus haut point, mais ça ne suffit pas pour t’écarter de ce chemin-là. Ou alors. Une mimique. La couleur d’un vêtement. Un comportement. Et pourtant tu suis ce fil-là. Tous ces travers comme des encouragements dans la partie sombre de toi-même. Je me suis faufilé là. Je ne le passerai pas sous silence. Tu ne m’éviteras pas. Je te parlerai de son sexe, de son goût, de notre désir, de notre délire commun de tout transgresser. On ne peut comprendre que par le corps. Une fois franchies certaines frontières, l’envie de retour s’effiloche. Et puis lâcheté, confort, pitié. Alors je suis retourné quand même, pas au même endroit. Ce que j’ai découvert là, c’est une absence de regard. Le corps non habité. La vacuité. J’avais vécu intensément. J’étais mort.
Texte et photo : Marlen Sauvage
Un texte écrit pour l’atelier d’été 2018 (Construire une ville avec des mots) de François Bon sur le tiers-livre. Pour chaque auteur(e), une page… et un oloé…