Ecriture et peinture, Liliane Paffoni

Vilhelm Hammerschoi (domaine public). Interior from Strandgade with sunlight on the floor, 1901.

Dire que la peinture a une influence sur mes écrits est un peu  péremptoire et catégorique car l’influence de l’une sur l’autre est compliquée. La peinture y a une place, c’est évident. Mais laquelle ?

Ce n’est pas tant le tableau dans sa globalité qui est source d’inspiration mais plutôt un fragment, un objet, une atmosphère, une couleur…

Je pense à un texte écrit récemment sur l’errance. Pour ce texte, c’est évident que le tableau de Quint Buchhollz «  Mann auf dem Kopf Gehemd » (l’homme qui marche sur la tête) est à l’origine de mon écriture. C’est un élément du tableau, une valise, qui s’est imposée immédiatement. J’ai oublié le grand ciel blanc, le chemin, la lumière, les bas-côtés herbeux et le lapin à gauche, le complet porté par l’homme. Tous ces éléments, je les ai laissés de coté mais n’ai-je pas pris, involontairement, leur contraire ? Le chemin est devenu le couloir, la nuit a remplacé la luminosité du tableau. La valise est là mais elle a quitté le tableau, y a laissé son enveloppe et vient « renaître » dans le texte. Peut-être ?

Pour moi, les représentations étranges et mystérieuses de la réalité de ce peintre permettent d’enrichir la création littéraire. 

Il y a aussi l’univers poétique de Vilhelm Hammerschoi, ses personnages féminins, souvent vêtus de noir, vus de dos, statiques, dans des décors vides aux tons gris, verts et blancs sont également une invitation à l’écriture. J’ai envie d’entrer dans ces décors dépouillés, d’emprunter ces enfilades de portes ouvertes qui nous emmènent sur des voies que l’on n’aurait pas forcément prises et à aller vers une écriture insolite.

Les toiles de Hopper avec ses personnages campés dans des décors banals et tristes, l’absence de communication entre eux, leur solitude sont une sorte d’appel pour l’écrivain. Faites-nous vivre, raconter notre histoire, briser notre solitude et notre malaise…

Dans d’autres cas, ce sera ce qui n’est pas représenté dans le tableau, ce qui est hors cadre, quelque chose qui n’est pas là mais que moi, je vois et qu’il faut dire, qu’il faut écrire .

Dans Le Collectionneur d’instants, Quint Buchholz écrit : « A chaque tableau mène un chemin invisible (…). Le peintre doit trouver ce chemin. Et il ne doit pas montrer  trop tôt ce qu’il peint, sinon il risque de perdre le chemin. »

Pour moi, cette réflexion peut également s’appliquer à l’écriture ?

Liliane Paffoni

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