Famille, par Monika Espinasse

© Marlen Sauvage 2021 – Saint-Laurent-de-Trèves (Cans-et-Cévennes)

Je suis l’aînée de la famille, famille nombreuse, famille cocon, famille amour, famille enfermement. Création de mes parents selon leur désir, leurs aspirations, leurs manques aussi, et ils en étaient fiers. C’était leur œuvre, leur présent, leur avenir. Leur cadeau aux enfants. Rien n’a compté autant que la famille, parents enfants creuset d’apprentissage d’émotion de soumission de rébellion, un cercle bien dessiné, aux limites précises, précisées, aux lois établies, à ne pas renverser… se débrouiller comme on peut pour accepter l’amour, rendre l’affection, prendre de la distance, se rebeller sans blesser, fuir sans abandonner… ne pas perdre le socle d’amour, mais apprendre la liberté de penser soi-même son avenir. Danser sur une chimère, sur un océan, sur du sable, sous les lumières du cristal, des étoiles. Chercher son chemin pas à pas.

Familles, je ne vous hais pas, moi je vous aime, je vous admire… tous ces efforts pour être ensemble, pour rester ensemble, tous ces compromis, ces sacrifices consentis pour un projet aussi vaste, aussi incertain. Et si on y renonçait ? Vivre seule, se suffire à soi-même, avancer à son rythme, sans contrainte, sans attache, avenir ensoleillé, un peu de pluie, un peu de vent, du froid qui fige l’émotion, patatras, on est malheureux, malheureux tout seul… et puis on repart vers le bonheur qu’on se crée, qu’on essaie de tenir à deux mains, fort, est-ce qu’on regrette la famille douillette, est-ce que la solitude pèse parfois ? Entre les liens attaches volontaires ou subis et une liberté arrachée au passé qui étreint, est-il possible de choisir ? Voie toute tracée ? Tradition, conviction ou hasard de la vie ? Hasard bonheur accident malheur on est l’acteur, mais rarement le réalisateur dans le film de sa vie. Faire face, ne pas sombrer, danser sur un volcan avec adresse, avec talent, confiante dans l’avenir qui se dessine.

Autrice : Monika Espinasse

Texte issu du stage d’écriture à La Ronceraie, en Lozère, mai 2022.

Un commentaire sur “Famille, par Monika Espinasse

  1. ainée aussi.. et par longues périodes en dehors… mais le lien ne se rompt pas (même avec désaccords ou différences de trajectoires) et se renoue inexorablement et chaque fois c’est plaisir

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s