Dénombrer ce que l’on souhaite en un temps et un espace donnés… J’ai d’abord pensé à compter les nuages, si changeants dans le ciel de printemps, et puis ce matin, aucun nuage à identifier clairement, seulement un ciel blanc posé sur le bleu apparent par endroits. J’ai donc opté pour tout autre chose… 40 exercices pour le carnet d’écrivain.
Dans l’encadrement de la fenêtre à deux vantaux, un olivier qui occupe tout l’espace de l’œil, à première vue ; pourtant dans l’angle gauche, une trouée de ciel, un bout de toit de tuiles et sa cheminée chapeautée. Au loin, un pin parasol, et tout juste au premier plan, le grenadier aux fruits morts. Un. Tout en haut à gauche, une grenade ronde comme une prune perchée sur une branche dressée vers le ciel bleu et blanc, aux nuages diffus. Le regard englobe le vantail de gauche et quatre fruits : un deux trois. Trois autres à droite du premier, sur une même ligne oblique ; le plus haut, noir à la forme d’une goutte effondrée ; au milieu, la silhouette d’un oiseau mais c’est bien une grenade éventrée vide et sèche, tout à droite, une tache sombre. En bas du rectangle vertical, une autre grenade en forme de piaf, plus claire toutefois. Comme un moineau au plumage marron qui tournerait sa petite tête légèrement à droite. Et puis dans l’espace du vantail droit, tout un jeu de clochettes, de fruits pourris, foncés, accrochés au petit bonheur la chance aux branches fines et piquantes – effilées comme des aiguilles – qui auraient survécu aux assauts du mistral. Un deux trois quatre cinq six sept huit. Leur couleur se perd dans l’ombre des feuilles d’olivier derrière le grenadier tout effeuillé. Au total, treize enveloppes de grenades à droite ; six à gauche maintenant que je compte de nouveau… La sixième petite poche tordue et noire comme du charbon, suspendue à un fil de bois sec, surgissant du bas de la fenêtre parce que je viens de me redresser.
Tous ces visages que l’on croise et dont il ne faut retenir que l’essentiel… des visages inconnus… et une contrainte d’écriture, cette barre verticale pour les séparer… 40 exercices pour le carnet d’écrivain, de François Bon, septième proposition.
@ Marlen Sauvage 2019
Des yeux d’ombre creusés dans les orbites sur un visage diaphane, centenaire, coincé dans l’angle du mur, un visage tourné vers le couloir où les pas débusquent le silence | à contre-jour la main droite qui porte vers une bouche lointaine, inaccessible, un verre d’eau et le profil bourru se réveille, ses traits s’agitent, seul le regard reste perdu | les sourcils relevés ainsi que les coins de la bouche pour un bonjour joyeux et un questionnement sous l’accent circonflexe | un oiseau qui volète à même la peau comme pris dans l’encolure de la chemise et que le corps dévoile en bougeant | le regard baissé vers les pieds qui tentent de rentrer dans l’habitacle et ce coup d’œil furtif vers le passant qu’il reconnaît |
Sixième proposition de ces 40 exercices pour le carnet d’écrivain, de François Bon, que je dois tenir durant quarante jours donc… Une phrase pour démarrer… un inducteur… Personne d’autre que moi n’aurait remarqué que…
@ Marlen Sauvage 2019
Personne d’autre que moi n’aurait remarqué le mouvement de ses lèvres pendant sa lecture dans le silence de la soirée bien entamée, à la nuit déjà, les yeux rivés sur son livre, et moi près de lui, occupée à écrire dans mon carnet, à percevoir le moindre bruit dans la chambre, car mon occupation du moment était celle-ci, écrire sur le silence et sur ce qui le perce à peine ; personne d’autre que moi n’aurait imaginé la raison de ce mouvement des lèvres, à savoir qu’il s’agissait d’un livre dont il se demandait s’il ne l’avait déjà lu, qu’il ne reconnaissait pas encore comme tel, et je l’observais du coin de l’œil, m’interrogeant sur la durée de ce chuintement ; personne d’autre que moi n’aurait compris que ce murmure des mots n’était qu’un hameçon lancé à sa mémoire, l’envoi d’une phrase, d’une idée qui éveillerait un souvenir si pâle qu’il pourrait en conclure que oui, il avait déjà lu ce livre, un souvenir si ténu qu’il pourrait se consoler de l’avoir égaré parmi d’autres ; personne d’autre que moi n’aurait perçu le désarroi dans cette phrase toute bête lâchée en refermant le livre après des dizaines de pages : je l’ai déjà lu.
Mon support pendant 40 jours : le livre de François Bon aux éditions du Tiers Livre, 40 exercices pour le carnet d’écrivain. Aujourd’hui pour cette cinquième proposition, quelques notations sur le ciel du jour. Celui d’hier, donc.
@ Marlen Sauvage 2019
Ciel de neige blanc de zinc strié de zébrures gris pâle dispersées au-dessus de la montagne de Vaux. On sait que par-dessous, la couche est bleu clair, elle perce en purs aplats par petites touches.
Bleu mais bleu ! Chargé de vent dans ses hauteurs pour être ainsi dégagé, et le vent fait battre les volets, arrache les câbles fixés aux murs, à la climatisation extérieure installée sur le toit de la maison voisine, un ciel d’été en hiver encore et le vent continue de secouer l’olivier de la place.
Par la fenêtre, un ciel nébuleux, une mousse blanche qui se déplace dans le bleu amorphe de l’instant d’avant.
Une trouée lumineuse, teintée de rose, éclaire une plaine bleue qu’envelopperont bientôt d’épaisses écharpes nuageuses encerclant cette oasis rayonnante.
Le rose peu à peu atténue la tristesse grise qui stagne au-dessus des toits. Le soleil quelque part derrière les maisons doit illuminer les montagnes qui surplombent l’Aygues et le pont roman, mais ici, dans la froidure vespérale, nous sommes prisonniers derrière nos fenêtres, de ses moutonnements.
A la nuit tombée, un noir qui n’est pas d’encre… quelques flocons en chute libre…
Je travaille donc pendant 40 jours avec le livre publié par François Bon aux éditions du Tiers Livre, 40 exercices pour le carnet d’écrivain. Cette 4e proposition ne réclame qu’une phrase attrapée au réveil ! C’est donc ce qui suit, sous la photo, et j’aurai l’occasion dans ma série Rêves de donner une explication à cette phrase surgie vers 3 heures du matin.
Reçu récemment 40 exercices pour le carnet d’écrivain publié par François Bon aux éditions du Tiers Livre et décidé de mettre en pratique durant 40 jours lesdits exercices puisque l’écriture doit être quotidienne. Et nous verrons ce que je peux tenir, de mon côté, et non en atelier, soutenue, stimulée par des dizaines d’autres participants comme ce fut le cas dans les nombreux ateliers proposés par François. Je n’indique pas la proposition, j’y réponds seulement. Je suis très scolaire, j’ai toujours tendance à me tenir aux exigences d’une contrainte parce que j’imagine que derrière, il y a des enjeux spécifiques, et que ceux-ci ne m’apparaîtront que plus tard. Le plus souvent, c’est ce qui arrive. En trois mots, je fais confiance !
@ Marlen Sauvage 2019
« Comment tu t’appelles ? » Dans la nuit tombée, je suis penchée, referme les volets, trop grands, trop lourds, qui m’arrachent l’épaule. Tout en bas de l’angle aigu, sombre, dans l’interstice des panneaux de bois, une face levée vers moi. Du rez-de-chaussée à angle droit vers le deuxième étage où je me trouve, un visage à contre-jour, glissé dans l’entrebâillement des volets de son appartement. Un visage à peine éclairé par un lointain réverbère. S’adresse-t-on à moi ? J’hésite. La place est un lieu de passage. J’observe dans ce petit espace la tête qui porte sa voix jusqu’à moi. Je la distingue à peine. « Comment tu t’appelles ? ». Un deuxième essai. Mon silence. Il aurait fallu ne pas craindre l’autre, freiner cette rampante injonction intérieure exigeant de ne pas répondre. Il aurait fallu oublier que la nuit favorise l’audace et comprendre que sous la question vibrait un appel. Il aurait fallu entendre la solitude qui parvient à briser toutes les timidités. Il aurait fallu un peu plus d’humanité peut-être.
Reçu récemment 40 exercices pour le carnet d’écrivain publié par François Bon aux éditions du Tiers Livre et décidé de mettre en pratique durant 40 jours lesdits exercices puisque l’écriture doit être quotidienne. Et nous verrons ce que je peux tenir, de mon côté, et non en atelier, soutenue, stimulée par des dizaines d’autres participants comme ce fut le cas dans les nombreux ateliers proposés par François. Je n’indique pas la proposition, j’y réponds seulement. Je suis très scolaire, j’ai toujours tendance à me tenir aux exigences d’une contrainte parce que j’imagine que derrière, il y a des enjeux spécifiques, et que ceux-ci ne m’apparaîtront que plus tard. Le plus souvent, c’est ce qui arrive. En trois mots, je fais confiance !
@ Marlen Sauvage 2019
Une couverture noire, un carnet de facturation peut-être, ou un carnet de commande, avec un double carbone, une écriture penchée sur la droite, l’obligation pour moi d’écrire penché sur la droite, au stylo ou au crayon ? Et si au stylo, bleu, de préférence, non ? Un titre en première page, lequel ? L’image qui ressuscite n’est-elle pas celle d’une page quadrillée ou rayée ? Rayée de rose… A voir. Mais où retrouver ce genre de carnet, cahier, facturier ? Si, j’ai une idée. Mais ce ne seront plus les mêmes. Enfin, où trouvai-je le temps d’écrire, et surtout seule dans cette maison ? Où ? A même le lit, allongée, probablement, ce grand lit partagé. Ou en haut d’un chêne truffier, assise de guingois à l’intérieur de la fourche de deux branches, les fesses griffées par les brindilles crochues et les feuilles drues. A douze ans, un roman policier, un titre, une histoire, des personnages, de l’action ! Et qu’est-il devenu ce roman ? A-t-il alimenté le feu destiné à éliminer nos souvenirs, notre enfance, notre jeunesse, ce grand feu qui dans la cour de la maison brûlait sous les assauts du mistral tout ce qui y était jeté, cahiers d’écolières, jouets, ballons, poupées, oursons ?
[Sans doute ai-je l’impression, à cultiver ce décalage, de ne plus parler vraiment de moi…]
Lundi 2 juillet 2018 Enfin le matelas – à mémoire de forme (s ?)… – est livré dans son carton vertical sur le pas de la porte. Il sort de ses entraves comme un ressort bondissant. Je peux recevoir les amis.
Mardi 3 juillet Atelier à distance avec les « Dames des Cévennes ». Obligée de me replier à Aubres. Pas de connexion ici… Bon groupe encore et belle complicité.
Mercredi 4 juillet Le cercle de Guernesey avec Brigitte. N’avais pas lu le livre, pas emballée par le style et là, bien aimé cette histoire sur fond de Deuxième Guerre mondiale.
Jeudi 5 juillet Pas de téléphone, plus de sonnerie en bas, Marie finit par frapper comme une dingue sur le heurtoir ! Belle soirée à se raconter nos derniers mois, elle et le journal où l’ambiance est de plus en plus médiocre. Moi et mes allers-retours entre Tunisie et France, la valise chez l’un ou l’autre durant un semestre. Et nos projets ! En début d’après-midi livraison d’un superbe bouquet de fleurs – violet crème vert – toutes les nuances… Julie…
Vendredi 6 juillet Départ de Marie. Au petit-déjeuner elle me raconte son trip au Maroc avec ses deux grandes ados et le plus jeune. Une super maman…
Le 9 juillet Cartons. Rangement. J’écris dans la foulée des souvenirs que tout cela remue. FC m’a donné les grandes lignes du projet d’écriture. Je suis impatiente de mette des mots sur les rencontres qui se profilent.
Le 10 juillet Anniversaire de la Billie. Crevettes et bière fraîche. C’est le temps de France-Belgique. Un très beau match courtois. Je suis incapable de me concentrer sur ce qui se passe. Le plus souvent mon esprit s’évade avant de revenir au fait ! Je mets en place des personnages issus du passé, pas tout à fait les vrais, un peu de ce que le passé me restitue. Je continue d’écrire.
Le 11 juillet Toujours l’impression que les arbres vont entrer par la fenêtre, poussés par le pontias. Bonne odeur d’huile de lin dans les escaliers, mon tour de ménage, deux copropriétaires, la vie facile. Apéro dînatoire chez B et P. Retrouvé la famille. Soirée à la fraîche. J’écris toujours pour Francois Bon, tentant de tenir un rythme d’écriture tous les deux jours…
Le 12 juillet Brigitte à dîner. Avant, une balade au fil de l’Eygues. Trop chaud. Encore avant, grand ménage dans l’appartement enfin quasiment rangé. J’ai pu installer mon bureau. L’imprimante fonctionne. Réuni les papiers pour les changements qui s’annoncent : listes électorales, nouvelle identité. Le Buena Vista Social club local s’est invité encore sur la placette. Une nouvelle chanson au répertoire. Un classique. Oublié lequel. Le gentil livreur qui venait pour mes voisins s’est excusé de m’avoir peut-être réveillée pendant l’heure de la sieste ! Skype avec J., fatiguée, W. en tournée, S. toujours aussi difficile à élever. Dans les larmes elle m’explique son impatience parfois, se plaint de la difficulté d’éduquer les enfants… et voilà comment des petits loulous peuvent transformer un trésor de patience en maman surmenée…
Le 13 juillet Aujourd’hui vendredi, RV Pôle Emploi. Mais aucun revenu de ce côté-là, puisque pas de cotisation en tant qu’auto-entrepreneur depuis ces dernières années (la belle appellation bidon mais comment faire quand on ne trouve plus quiconque pour se faire employer ?), normal. Donc aucune chance de récupérer quelques trimestres non plus… Déclaration de cessation d’activité pour l’Urssaf. Un vendredi 13, quoi.
14 juillet Villedieu pour un repas sous les platanes au milieu d’une foule raisonnable et un spectacle tellement raté que nous retournons à Nyons. Ambiance rock nettement plus professionnelle.
16 juillet Aujourd’hui j’apprends par Tunisair que pas de chats en soute… Je ne pourrai donc emmener que l’un des deux en cabine… A Valréas, Espace Niel, avec Brigitte Les Fantômes de la rue Papillon, sur la fraternité avec Eddy Moniot et Michel Jonasz. Judith Magre prête son visage et sa voix à la sœur du vieux juif. Un parallèle entre deux époques et le constat triste que l’humanité ne change guère… Racisme, intolérance, manque d’intérêt pour l’autre et incompréhension. Le concert qui suit est tonique : deux musiciens de La Nouvelle Orléans jouent des charlestons et du jazz new Orléans, de quoi réveiller les endormis. Léonard Blair saxophoniste, et x le pianiste. Cauchemar. « Elle » est dans mon lit ; lui, je le harcèle, il me ridiculise. « Elle » a un accident, je ne sais plus lequel, on la plaint, je suis encore la méchante ! Jusqu’où (jusqu’à quand) le passé nous obsède-t-il ?
17 juillet Heureusement, R. arrive !
20 juillet Après-midi au lac voisin. Et farniente familial.
21 juillet Virée dans les pas du passé pour la énième proposition d’été de F. Bon. Retour à Montségur, tant de choses ont changé, presque tout est découverte dans ce village où l’école est transformée en médiathèque, l’ancienne mairie en un lieu culturel, je pense… remplacée par un bâtiment ocre à la sortie du village. Dans les chemins de traverse où je me gare ça sent bon la lavande, mon enfance.
L’église… tous ces souvenirs de messe encore en latin, de curé en soutane, et B. qui gardait les sous de la quête pour acheter des bonbons qu’elle mangeait derrière le bâtiment !
Juillet encore Petite virée solitaire à Courthézon [ne suis plus sûre du nom du village], avec le massif des Dentelles de Montmirail au loin… Découverte des tableaux d’un peintre aixois avec lequel je discute pendant une bonne demi-heure. Délicieuse glace à la lavande dégustée dans les rues pavées.
Dans les rues de Monastir
Une femme en safsari
File d’un pas pressé
D’une main elle retient Son voile Elle porte des sandales
A la semelle épaisse
Et disparaît sous le porche
d’une impasse
29 décembre 2017
Réveil dans le grand soleil chaud de Nefta, où je découvre l’hôtel du jour (que nous avons atteint à la nuit…).
Chaque porte de la ville est surmontée d’un vers du poète national Abu El Kacem Chebbi, que me traduit A. Ici « Si un jour le peuple décide de vivre, alors le destin ne peut que se soumettre. » Cette parole a enflammé le désir d’indépendance du peuple tunisien (l’hymne national le cite), est devenue la phrase fétiche du monde arabe inspirant un désir de liberté. Mais peut-on vouloir se prendre en main sans Dieu ? La phrase a été jugée blasphématoire par la mosquée de la Zeitouna… Le poète renié revient mourir à Tozeur.
Balade dans les rues de la ville, visite du marché aux fruits de saison, des ruelles aux bâtisses de pierre claire et aux portes ouvragées posées entre deux murs de béton, de l’oasis victime d’un manque de civisme navrant avec le dépôt incompréhensible de déchets en tous genres… Comment est-il possible de laisser ainsi se côtoyer les plus belles inscriptions poétiques et la puanteur d’une déchetterie à ciel ouvert ?
Loin du groupe, nous nous installons pour boire un thé avant de déjeuner dans une gargote au mobilier bleu Majorelle, d’un poisson grillé sous nos yeux et… sur la rue ! Des cars déversent leurs touristes dans la ville, Ibn Khaldoun observe tout cela de sa hauteur quasi céleste, perché sur un piètement de mosaïque bleue que supporte une double colonne de pierre grise.
Bientôt il faut rejoindre les autres pour filer en direction d’un site à visiter (oublié le nom du site…), où je me contenterai de l’oasis voisine et des ruelles du village, faute de pouvoir supporter le dénivelé du canyon… Zied me tient compagnie.
J’erre alentour… des voix m’attirent et je m’approche d’un homme qui trie des dattes à même un tapis posé dans l’herbe fleurie tandis qu’un jeune homme, grimpé sur un palmier dattier, sectionne les régimes avant de les faire glisser sur un fil tendu entre l’arbre et le sol. Nous échangeons quelques mots. Je m’étonne de la couleur orangée des branches. Alors que je me suis écartée pour lire, le monsieur vient déposer près de moi un régime de dattes jaunes et juteuses. Aïchek. Sourires.
Dans le village écrasé par la torpeur, un vendeur de pierres et de fossiles m’explique l’origine des coquillages, huîtres calcifiées, coquilles saint-Jacques, bigorneaux, bois pétrifié, calcédoine bleue, micaschiste, et bien sûr roses des sables qui s’amoncellent sur ses étals. Quelques ruelles plus loin, je découvre à quel point la terre en regorge car au bout du village, le sol en est jonché. La vue magnifique ouvre sur un défilé ocre où coulait jadis une rivière large, le canyon est profond, la montagne au loin ondule comme une mer pétrifiée.
Zied me raconte sa manière de faire découvrir la Tunisie aux touristes de l’association « Ritmi e danze dal mondo ». La Tunisie sous toutes ses facettes, plus ou moins photogéniques, authentique en tout cas.
Le groupe d’amis italiens réapparaît à quelques mètres au-dessous de nous, leurs voix les ont précédés. Comme nos guides – Stefano, Sabrina et Zied – ont décidé de nous en mettre plein les yeux (et les jambes), nous repartons à tout berzingue en direction de Tamerza. il est près de 16 heures, le soleil est encore haut… d’un seul coup, fatiguée, je trouve que la journée est longue !
Je choisis une fois de plus de rester avec un petit groupe aux jambes lourdes pour éviter une longue balade. Courte déambulation au milieu de petites cascades qui formaient il y a peu de temps encore un petit lagon. Rien d’extraordinaire cependant jusqu’à ce que le soleil tombe en jetant son badigeon ocre sur le paysage.
Après un bref passage à notre hôtel, nous repartons vers la Dar Houidi dans les ruelles de Nefta, une maison qui appartient depuis huit générations à la même famille, et que tient un monsieur charmant, malade du cœur, enfoui dans un burnous marron (la tenue des hommes ici). On nous sert brick et chorba avant un couscous puis du poulet grillé et des fruits dont les fameuses poires locales que je ne goûte pas d’ailleurs, ayant déjà la panse fort remplie. Musique traditionnelle et danses, transes et marche sur les braises, finissent de nous transporter…