Carnet d’écrivain #37

© Marlen Sauvage 2019

« J’élève l’urne autour du parfum pour qu’il demeure. » De qui est cette phrase, je l’ignore. J’ai longtemps cru que Mallarmé en était l’auteur, mais je ne trouve rien de ce côté-là (sur Internet…). Elle me poursuit depuis mon année de première, je crois me souvenir que le professeur de français de l’époque – un prêtre, le père Imbert (il y a cinquante ans, je peux le nommer) – l’avait citée, mais là encore, je doute. Elever l’urne, c’est tenter de se mettre à la hauteur de ce qui nous dépasse, du sublime, de la beauté… C’est faire preuve d’humilité mais on peut y voir aussi de l’arrogance. Car prétendre capturer l’inaccessible, quelle vanité ! Se bercer d’illusions… Pourtant, à cette époque, j’avais quinze ou seize ans, cela résonnait comme une invite à la spiritualité. Bizarrement je crois que c’est à cette citation que je dois de préférer le vide au plein, l’impalpable au tangible, le parfum à l’urne.

Avis aux illustrateurs…

« Toute illustration a un effet abêtissant lorsque le facteur de la surprise lui fait défaut.
Ce qui est à voir ne doit jamais être la même chose ni simplement plus ou moins que ce que dit l’inscription, mais il faut que cela apporte quelque chose de nouveau, un subterfuge de l’évidence qu’il est fondamentalement impossible d’obtenir avec des mots. » 

Walter Benjamin, Ecrits autobiographiques, p. 170, Christian Bourgois éditeur, 1994.