[Galway] Le 27 mai, au petit-déjeuner, nous montrons les photos des demoiselles Mignon et Mespoulet (M & M) à notre hôtesse qui affiche dans son salon une photo de William Street, datant des années 1950. [Je crois me souvenir que c’est grâce à cette photo que nous retrouvons la rue de Galway photographiée par les M & M lors d’une foire de bétail, p. 37 du livre qui leur est consacré.] Puis nous allons dans Galway à la recherche des sites photographiés par M & M.
Première étape : le fish market que nous retrouvons sans peine, déjà repéré la veille.
[Sur le cliché original, à droite de la photo, un groupe d’une huitaine de personnes dont seules 3 n’ont pas bougé ! Les demoiselles précisent que ce sont les femmes, « moins patientes » qui sont la cause du flou… Une femme toute de noir vêtue, la tête recouverte d’un grand châle, deux hommes chapeautés, l’un porte sous le bras gauche ce qui pourrait être du poisson enveloppé dans un papier journal. Plus loin 3 hommes discutent. Les maisons à l’arrière-plan, très grises sous un ciel de pluie, ont changé, mais elles restent reconnaissables. Celle de gauche aujourd’hui à la porte et à la vitrine rouges affichait une cheminée sur son pignon, c’était le lieu d’une boutique qui mentionnait un nom « M. CONNOLLY ». Nous n’avons pas pris autant de recul que les demoiselles pour photographier le lieu. Il nous manque 2 maisons à droite…]
Puis, plus difficile, la rue de la vente du bétail (2 photos prises par les M & M).
[Sur la photo originale, une vache au premier plan et de jeunes garçons arborant casquettes, vestons, chaussures et guêtres. Ils ont bougé, l’instantané est flou. Une foule se presse derrière eux, on distingue quelques chevaux parmi d’autres bêtes à cornes. Contrairement à cette image, la nôtre a été prise par temps clair et ensoleillé.]
[C’est cette rue qu’il nous était difficile d’identifier sans l’aide de notre hôtesse du B&B de Galway. Le cliché pris par les demoiselles a été reproduit en noir et blanc, dans un petit format, comme 28 autres clichés que l’on trouve à la fin du livre, dès la page 123. Leur photo représente la même perspective que la nôtre, les bâtiments de gauche sont aisément reconnaissables, ceux de droite ont quelque peu changé. On y voit seulement les bâtisses du premier plan, avec les grandes fenêtres, tandis qu’au rez-de-chaussée on distingue des porches. Au premier plan à gauche et à droite, quelques vaches noires dont les M & M expliquent qu’il s’agit d’une race typique de l’ouest de l’Irlande.]
Nous retrouvons sans peine aussi la porte, près du square Kennedy. Les indices qui nous aident à repérer les lieux ne sont pas ceux que l’on croit… [notations sibyllines impossibles à décoder 14 ans plus tard…]
[Sur le cliché original en noir et blanc, la porte avait encore son énorme portail en bois, et une grille en fer forgé de part et d’autre de la structure. Elément d’architecture du XVIIe siècle, cette porte symbolise la prospérité de Galway à l’époque du commerce entre Espagne et Irlande.]
A l’intérieur du pub Murphy dans William Street, nous discutons avec deux messieurs âgés de 65 ans ou davantage, qui sont intéressés par notre livre.
Le barman aussi en redemande ! Les questions fusent, nous racontons notre projet. Ils nous parlent du Claddagh [C’était à l’époque un petit village de pêcheurs qui a été entièrement détruit pour cause d’insalubrité. Les travaux avaient commencé lors de la visite des M & M.], ils essaient de reconnaître des endroits, s’agitent beaucoup et nous conseillent d’aller en face montrer notre livre chez Kennys (bookshop). Ce que nous faisons. Mme Kenny mère est sûre d’avoir vendu ce livre il y a quelques années, en français. Elle nous renvoie vers son fils qui tient la Art Gallery dans la même boutique. Elle nous dit qu’elle sera très intéressée d’avoir un exemplaire de notre livre quand il sera sorti… [Encore un vœu pieu… unfortunately! Nous nous étions pourtant donné le temps de l’écrire… 13 ans, pour fêter le centenaire du séjour des M & M en Irlande…]
Son fils, Tom, est très helpful. Notre histoire l’intéresse d’autant plus qu’il l’a suivie il y a plus de vingt ans quand il y a eu l’exposition de photos des M & M à travers l’Irlande [donc bien avant la publication du livre par le conseil général des Hauts-de-Seine]. Lui-même possède de nombreux slides et connaît les noms des gens qui apparaissent sur les photos. [Nous avons fait l’erreur de ne pas les lui demander !] Il nous conseille de lire Down by the Claddagh, de Peadar O’Dowd et nous assure qu’à Spiddle, nous pourrions peut-être retrouver l’une des chaumières du livre des M & M. Après renseignements pris auprès d’une de ses employées, il nous donne des indications : aller voir Jimmy Keady, un fermier qui vit à Shanagurraun, près de Spiddle et qui nous renseignera. Ce que nous faisons l’après-midi après avoir déjeuné au King’s Head, conseillé par les piliers de bar rencontrés le matin chez Murphy’s : très bon, très jeune, très sympa.
Jimmy Keady s’avère également très sympathique, après avoir mis quelque temps à comprendre qui était Tom Kenny ! Il nous fait visiter une ancienne chaumière, au toit en tôle ondulée maintenant. Il nous dit que celle-ci a deux cents ans environ, comme celle un peu plus loin sur la route, à la forme très bizarre, en trèfle à quatre feuilles quasiment. Il nous apprend que les plus vieilles chaumières (il précise « de plus de deux cents ans ») sont les rondes, ce qui nous renvoie au bouquin de M & M qui disent la même chose, en ayant photographié une dans le Claddagh (mais à vérifier quand même). [J’ai beau chercher, je ne vois pas de maison ronde dans ce livre ! Juste une petite chaumière, qui était alors la plus petite du Claddagh, que les M & M appellent « maison ruche » pour le mode de construction, en « pierres non cimentées ».]
Le 28 mai, le temps s’annonce sunny. Delia confirme que for a change, nous devrions avoir beau temps aujourd’hui et dix minutes plus tard, c’est une averse de grêle qui s’abat sur la ville ! On trouve la petite maison de chaume qui reste dans la rue St Domenicks, transformée en groceries. Puis on prend une photo du Claddagh actuel, en s’appuyant sur une photo trouvée dans un des deux bouquins achetés chez Kennys. [Non retrouvée dans ma sélection.]
[Je me souviens comme nous avons sauté de joie en trouvant cette petite chaumière oubliée au milieu de constructions modernes. Nous avons voulu y voir une trace de ces petites maisons du Claddagh…]
(…)
A Clonmacnoise, belles ruines de cathédrale (Xe s avec porte photographiée du XVe) selon un guide qui faisait les commentaires.
Nous traversons le cimetière le plus récent pour marcher à travers la campagne pendant dix minutes et nous admirons la porte de la nun’s church, superbe au milieu des prés. Seul le seuil a quelque peu changé.
Puis nous fuyons les touristes pour repartir en direction de Glendalough. Nous avons notre petite idée pour dormir ce soir. A Athlone, nous nous arrêtons le temps justement de passer un coup de fil au B&B en question, mais ça ne répond pas. Nous profitons de cet après-midi de dimanche où tout le monde s’est retrouvé dans ce restau, pour manger des pastries. Nous repartons et nous nous arrêtons à Trim pour trouver le fameux B&B. Il est déjà aux alentours de 19 h et le B&B n’existe plus, il faut se rendre à l’évidence… M. a avisé l’hôtel du coin, allez, on pousse jusque-là. Génial, la chambre est à sixteen, on fait répéter… et l’on a droit à une magnifique chambre immense avec lit king size, divan et deux fauteuils, coiffeuse, desserte pour la TV, etc. La chambre est à sixty évidemment. Il y a de beaux cadres notamment un au-dessus du lit intitulé The morning of the wedding qui représente une jeune mariée en train de se préparer avec l’aide de deux femmes, sous le regard intéressé d’une petite fille à gauche du tableau.
Visite et balade au château de Trim où fut apparemment tourné Braveheart. Arrêt dans un des nombreux pubs de la ville et nous pouvons observer qu’en ce dimanche soir, amis, familles avec enfants, se retrouvent autour d’une bière ou d’un soda. L’ambiance est bon enfant. Nous nous installons confortablement, des musiciens se pointent vers 9 h p.m. mais ils ne commencent pas à jouer avant 10 h, tant ils rapportent d’instruments ! Pendant ce temps, le pub se vide puis se remplit à une allure surprenante. Tout le monde est là : ceux du village et des environs ! Des jeunes, des moins jeunes, des vieux. Nous observons le manège du « je-te-paie-un-verre-et-tu-m’en-paies-un-en-échange » entre un homme et une femme, sans qu’un mot entre eux ne soit prononcé ! Puis les musiciens jouent, bien, à notre surprise, plus tard les gens se relaient, surtout des femmes, pour chanter et danser ; on parle avec nos voisins qui nous invitent chez eux pour des vacances à Westport ! Eileen et Tony G. Elle est Irlandaise, 45 ans, il est Anglais (environ 60 ans). Ils ont une petite fille, Renée. Il ne touche pas à la Guinness qu’il a commandée ni au verre d’alcool. Elle a bu trois ou quatre verres d’alcool. Elle hurle dans mon oreille qu’elle adore son pays, qu’il la fait pleurer, qu’il faut que nous promettions de leur rendre visite. Nous parlons avec un autre couple, lui est cordial, elle un peu moins, cela s’arrange au fil du temps. A plus de minuit, nous plions bagage avec 2,5 litres de bière dans le gosier à peu près… Mais la Guinness est très bonne et ne saoûle pas, pas plus que la Smithicks de M.
Sur les traces de Mesdemoiselles Mignon et Mespoulet, agrégées, boursières d’Albert Kahn, membres titulaires de la Société autour du Monde, qui partirent en Irlande en 1913 et réalisèrent 73 clichés en couleur « pour Monsieur Kahn ».
(Titre du carnet de voyage écrit pour la circonstance du 17 mai au 2 juin 2000)
Cahiers et carnets – Des voyages – CI≠ 6
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