Une soirée sur la plage de Monsieur Hulot, à Saint-Marc-sur-Mer. Un rocher assailli par les moules minuscules, une pause dans le mariage, entre dix-huit heures et vingt heures, les pieds dans l’eau. J’écoute mes pensées, leur papotage recouvre celui des invités, plus haut sur le front de mer, il roule et bat comme l’océan mais à cette heure-ci pas de batailles, pas de vagues, la marée monte et je l’attends. J’entends la voix d’un professeur à quoi bon aller à la pêche quand on a déjà les poissons dans la main. Elle vient de loin très loin dans le temps. Au bord de la plage de Monsieur Hulot, les algues piègent mes orteils. Je m’étourdis du piqué des mouettes à la pêche de poissons brillants. Ici aucune profondeur marine, aucun poisson d’or. Celui de Paul Klee surgit un bref instant de son tableau bleu outremer. La peau mange le soleil qui tombe en miettes dans le soir naissant, on ne craint pas les coups, à Saint-Marc-sur-Mer un samedi de juin entre dix-huit heures et vingt heures. L’air est doux, la musique lointaine, haché le cliquetis des verres que l’on installe sous le barnum pour l’apéritif à l’Hôtel de la Plage. De temps en temps, le cri d’un enfant, ils courent quelque part sur le sable gris. L’un d’eux fait la roue et porte un habit jaune. Mais aucune partie de tennis, le jour tombe, les vacanciers repartent chez eux. Je voyage dans un temps incertain, dix ans, quinze ans, vingt ans peut-être à Saint-Marc-sur-Mer ce jour de juin. Et tandis que la mer ouvre et ferme ses portes 1 , la nounou cueille un poisson rouge.
1 – Yves Rouquette, poète occitan.
Image © Marc Guerra, Des poissons et des femmes, ≠26
Nous poursuivons notre voyage dans l’univers Des poissons et des femmes entamé le 4 janvier et pour une année entière : sur une image de Marc Guerra, j’écris un texte et publie le tout chaque vendredi… jour du poisson !
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